Alors que nous sommes dans les premières semaines de Janvier, chacun commence à établir son programme Catch pour l'année à venir. Si la grande majorité des fans a les yeux logiquement rivés sur la WWE et sa route vers WrestleMania, des alternatives sont aussi là pour égayer vos week-ends. Avec le développement d'Internet, de plus en plus de fans (y compris en France) acceptent de s'ouvrir au Catch indépendant et étranger.
Mais quand on demande aux nouveaux puristes ce qu'ils veulent suivre en 2018, on entend souvent les mêmes réponses "la New Japan, la ROH, un peu de PWG, de la PROGRESS de temps en temps." Sauf qu'en ce début d'année, je vais vous suggérer quelque chose d'autre, je vous propose de vous interésser à la NWA. Oui vous m'avez bien lu, la National Wrestling Alliance, vous savez cette promotion dont on nous parle tout le temps quand on évoque le Catch des années 80s, celui où brillaient Ric Flair, Harley Race et Dusty Rhodes.
Depuis le rachat de cette promotion par Billy Corgan, le chanteur du légendaire groupe Smashing Pumpkins, les choses ont énormément changé. En l'espace de quelques mois, la NWA est devenu une compagnie forte, aux palpitantes tribulations. Cette fois-ci le comeback ne devrait pas foirer, même si ça a été le cas à de nombreuses reprises. Pour faire simple, disons que l'on entrevoit la lumière pour la première fois depuis des décénnies.
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Trente ans à se faire marcher sur la gueule
Excusez cette expression quelque peu familière, mais si un retour de la NWA me ferait autant plaisir, c'est en partie car cette compagnie a subit tant d'affronts au fil du temps que ça frôle le malaise. Cette chronique n'a pas pour but de retracer toute l'histoire de la promotion, mais il est bon de rappeler les différentes coups de poignards qu'elle a subit en trente ans.
Outre les dissensions entre promoteurs pendant l'âge d'or, la rupture la plus brutale eu lieu en 1987, quand les Jim Crockett Promotions (vitrines de la NWA) fuent rachetées par le milliardaire Ted Turner, donnant ainsi naissance à la WCW. La deuxième gifle arriva en 1994 quand, après avoir survécu à la fin des "territories", la fédération plaça toutes ses chances dans la ECW, simple structure locale à l'époque. À la fin d'un tournoi sensé couronné un nouveau champion, Shane Douglas jeta la ceinture de champion du monde à terre pour lancer le règne de l'extrême à Philadelphie. Une énorme traversée du désert suivit, où Dan Severn porta à bout de bras le prestige de la NWA, avant de laisser la TNA prendre le relais. Une transition bien réalisée en un premier temps, qui prit fin tristement quand la compagnie floridienne créa ses propres titres mondiaux en 2007, laissant la NWA au bord de la route.
Depuis, la fédération a enchaîné les partenariats boiteux, un coup avec la ROH, un coup avec la NJPW. Le titre mondial a eu une pléiade de détenteurs, certains notoires (on pense à Adam Pearce et son rival Colt Cabana), d'autres plus anonymes. C'est à ce moment là que j'ai commencé à me ré-intéresser à la NWA, impressionné de voir que malgré les affres du temps, cette dernière tenait bon. En plus de découvrir des nouvelles têtes comme Kahagas, Brent Albright ou encore Jax Dane, j'ai vu la volonté de faire perdurer une histoire vieille de 70 ans. Une tradition qui retrouve de l'aplomb puisque, par chance, 2017 a été le théâtre d'un petit seïsme, avec l'arrivée au pouvoir de Billy Corgan.
Le choix de la simplicité
Tout s'est fait dans le courant de l'année 2016, quand Corgan (alors membre de la direction de la TNA) avait été contacté par le président de la NWA, Bruce Tharpe, pour entamer des négociations. Après le départ du musicien, et les embrouilles survenus entre lui et Dixie Carter, ce-dernier a repris contact avec la NWA, pour prendre la succession de Tharpe et racheter la marque en Mai 2017. À partir de là, la compagnie s'est vu complètement transformée. Visiblement motivé par son douloureux départ d'Orlando, Corgan a commencé à mettre en place un plan strict et ambitieux pour redonner de l'ampleur à la compagnie.
La première mesure instaurée a consisté en une mutation de la NWA, la fédération devenant une simple entreprise. En effet toutes les affiliations établies avec les petites promotions locales ont été supprimées dans le but de se consacrer à l'essentiel.
Autre directive importante, celle de diriger l'entreprise en petit comité, avec un duo aux commandes. Corgan s'est associé à Dave Lagana, un ancien scénariste de la WWE qu'il a rencontré durant sa période TNA. Le fonctionnement de la paire est simple, Corgan se charge de trouver des idées, et Lagana les met en oeuvre quasiment à lui tout seul.
Enfin, l'idée motrice derrière cette nouvelle NWA a été de mettre au cœur des débats le titre mondial poids-lourds, seul vestige de la grande époque à encore avoir de la valeur. Pour ce faire, une série web a été lancée, suivant les voyages de l'actuel champion.
Tim Storm et les Ten Pounds Of Gold
Le programme, intitulé Ten Pound Of Gold (surnom donné à la ceinture pesant dix livres d'or), est consacré aux défis que le détenteur du NWA Worlds Heavyweight Championship doit affronter. La série a débuté avec l'histoire de Tim Storm, le charismatique champion du monde qui se bat autant pour conserver son titre que pour prouver qu'il a sa place dans un ring. Car si la promotion fait preuve de transparence quant à son produit, elle le fait également pour sa star numéro un. En effet au fil des épisodes (durant entre 5 et 10 minutes) on découvre que Tim Storm est un catcheur de 52 ans, qui doit jongler entre ses combats, son travail de professeur d'histoire, et sa vie de famille (étant grand-père de dix-neuf enfants).
https://www.youtube.com/watch?v=L5XpNxu17Eg
La production est épurée, les storylines simples, et le message clair comme de l'eau de rôche. Le champion veut le rester, et les challengers se présentent à lui pour prendre sa place au sommet de la montagne. N'organisant pas encore de shows, la NWA envoie son champion dans différentes promotions où un challenger l'attend. On retrouve alors Storm à la CWFH californienne face à Nick Aldis, anciennement connu sous le nom de Magnus à la TNA, à la House Of Hardcore de Tommy Dreamer, qui lui lance un défi, ou bien dans le Tennessee à combattre un déviant du nom de Jocephus. Une trame basique, qui rappelle les règnes des grands champions tout en adoptant un look rafraîchi, parfaitement adapté aux nouveaux médias.
Savoir négocier le virage
Avec cette identité classique, qui rappelle la grande époque du Catch américain sans pour autant sombrer dans la nostalgie, la NWA retrouve enfin des couleurs ! Avec un président célèbre, une vraie ligne directrice, et l'attention retrouvée des grands médias, le duo Corgan-Lagana n'a plus qu'à assurer ses nouveaux projets. Interviewé il y a plusieurs mois sur son ambition, le rockeur a expliqué qu'il comptait établir "un plan sur 20 ans" pour la compagnie.
Désormais en pleine possession de ses moyens, la NWA va devoir passer à la vitesse supérieur pour se faire une place au soleil. Avec la récente perte du titre de Storm au profit de Nick Aldis, la rivalité amorcée entre l'ancien champion et le bagarreur Jocephus, ainsi que les nouveaux défis lancés par Tommy Dreamer et certains catcheurs étrangers, la promotion a de quoi faire pour l'année 2018. On est aussi en droit d'attendre la mise en place de shows produits à 100% par la NWA, avec pourquoi pas, une mise en avant des autres ceintures de la compagnie (tels que les titres tag team ou le championnat national).
Ce qui est sur, c'est que si vous voulez revenir aux bases du Catch américain, ou que vous souhaitez voir quelque chose qui diffère des autres structures indépendantes, l'émission Ten Pounds Of Gold est faite pour vous. Pour ma part, je continuerai à suivre les batailles autour du NWA World Heavyweight Championship ainsi que les péripéties de Tim Storm, dont le personnage est à l'image de la National Wrestling Alliance, terriblement attachant.