Crédit photo : NJPW
Le moins que l’on puisse dire c’est que la pression était présente sur les épaules de NJPW. En même temps comment cela aurait pu en être autrement, la compagnie sort de deux années phénoménales qui l’ont vues voir les choses en plus grand et partir à la conquête du « Wrestling World ». Seulement voilà, Wrestle Kingdom 13 était soumis à énormément de contraintes notamment contractuelles. La plus grande interrogation concernant le champion IWGP : Kenny Omega. Avec près de 40 000 spectateurs au Tokyo Dome, le record d’affluence pour un Wrestle Kingdom a encore une fois été battu, ce qui témoigne du poids toujours plus important que représente NJPW.
LE PRE-SHOW NJPW
Au terme d’un show qui a eu ses hauts et ses bas, 8 titres ont changés de main. Au sein d’une compagnie où les ceintures sont censées avoir un prestige particulier et une signification particulière, on peut dire que nous avons assisté à un nouveau départ. Voyons cela titre par titre. Commençons par l’opener : le titre Never Openweight. Souvent utilisé comme titre un peu « bouche-trou », l’affrontement entre deux des meilleurs catcheurs au monde : Will Ospreay et Kota Ibushi promettait de revenir à l’essence même du titre, c’est-à-dire permettre à des catcheurs de la division Junior Heavyweight de faire la transition dans la catégorie Poids Lourds et affronter de nouvelles têtes. Etant donné sa place sur la carte on pouvait s’attendre à ceux que les deux hommes ne fassent pas le match que tout le monde rêve de voir. Et pourtant, je ne vois aucun moyen de mieux démarrer le plus gros show de l’année et d’introduire les nouveaux spectateurs au produit que propose NJPW. Le match a été tout ce qu’il devait être : un mélange d’agilité, de Strong Style : des séquences fascinantes. Le meilleur dans tout ça est qu’on va sans doute avoir des rencontres bien meilleures dans le futur. Avec sa victoire, Will Ospreay gagne son premier titre hors de la division Junior Heavyweight et continue peu à peu d’opérer sa transition vers la division Heavyweight avec peut-être, et on l’espère une première participation au G1 Climax cette année.
Continuons avec, selon moi, le point faible de NJPW : la division par équipe et j’englobe la division Junior Heavyweight et la division Heavyweight. Le match pour le titre Junior Heavyweight Tag Team comprenait Roppongi 3K, El Desperado et Yoshinobu Kanemaru, puis pour finir le vainqueur : Shingo Takagi. On me dit dans l’oreillette que j’ai oublié BUSHI ? Mince, c’était peut-être le but. Un match oubliable donc de moins de 7 minutes pour couronner donc Shingo Takagi et BUSHI et qui n’a servi qu’à montrer tout le potentiel de Shingo Takagi qui peut devenir un pilier de la division Junior Heavyweight en solo voire peut-être même plus. Quant aux titres IWGP Tag Team Heavyweight, il était lui aussi en jeu au cours d’un triple threat avec les Gorillas Of Destiny (« Good Guy » Tama Tonga et Tanga Loa), EVIL & SANADA puis les Young Bucks. Légèrement supérieur au match précédemment cité, surtout grâce aux Young Bucks et SANADA, il reste quand même très oubliable lui aussi. Toute l’histoire autour de la nouvelle personnalité de Tama Tonga est quand même très divertissante. Ces deux matchs sont symptomatiques du manque de profondeur dans la division par équipe, et cela ne va pas s’arranger avec le départ des Young Bucks. Malgré cela, l’espoir de voir Zack Sabre Jr et Minoru Suzuki concourir pour le titre prochainement donne quand même une lueur d’espoir à cette division.
En parlant de ZSJ, évoquons deux matchs de championnats positionnés en milieu de carte et qui ont été plus ou moins bon. Évoquons tout d’abord le match pour le championnat British Heavyweight de la Revolution Pro entre Zack Sabre Jr donc et Tomohiro Ishii. Le match est très bon (en même temps avec ces deux-là comment voulez-vous faire autrement ?), mais encore une fois, il est très court (11 :31), et c’est à ce moment qu’on comprend peu à peu que la carte est vraiment construite pour mettre en lumière les 3 derniers matchs de la soirée. Passons ensuite peut-être au deuxième plus mauvais match de la soirée entre Cody et Juice Robinson pour le titre IWGP U.S. L’affaire a été pliée en moins de 10 minutes et Cody, tout comme les Young Bucks, quitte NJPW par la petite porte. Je commence sérieusement à me questionner sur les capacités in-ring de Cody qui, sans une grosse construction du match en amont et sans des catcheurs du niveau de Kazuchika Okada ou Kenny Omega, peine à sortir des matchs de très bonne qualité. Cela peut devenir un problème au sein de sa compagnie All Elite Wrestling car il va falloir se mettre au niveau des autres grosses compagnies dans le ring pour pouvoir faire sa place dans le paysage catchesque américain.
COMBATS PRINCIPAUX DE QUALITÉS
A mi-show, il reste donc les 4 matchs les plus attendus hormis l’opener. Tout d’abord le match pour le titre Junior Heavyweight entre KUSHIDA et Taiji Ishimori. Privé de Hiromu Takahashi depuis juillet dernier, NJPW a dû retourner aux bases en redonnant le titre à celui qui domine la division depuis plus de 6 ans : KUSHIDA. Will Ospreay s’envolant vers la division Heavyweight et Marty Scurll ayant un futur très incertain il est logique que nous ayons eu KUSHIDA contre Taiji Ishimori. Le match ne dépasse toujours pas les 15 minutes mais les deux catcheurs ont prouvés qu’ils méritaient leurs places au cours d’un très bon match. KUSHIDA a récemment officialisé son départ de NJPW, ayant accompli tout ce qu’il fallait accomplir dans la division Junior Heavyweight, on aura quand même quelques regrets quant à un éventuel passage dans la division Heavyweight. Logiquement Taiji Ishimori remporte pour la première fois ce titre et continue d’impressionner surtout par sa rapidité dans le ring que je trouve toujours aussi folle. A ce point-là du show on sent que l’intensité grandit suite à un excellent match Junior Heavyweight.
Cela faisait plus de 5 ans que Kazuchika Okada était dans le main event de Wrestle Kingdom, après peut-être l’un des meilleurs règnes de tous les temps avec le titre IWGP, nous avons assisté à un développement du Rainmaker qui me fascine toujours autant. Réussir à susciter autant d’intérêt alors qu’il venait de subir une des défaites les plus marquantes de ces 15 dernières années, est un exploit en lui-même. Après un enchainement de défaites, de dépressions, de trahisons est-ce que le véritable Rainmaker était de retour ? Eh bien oui, enfin presque. La réaction de la foule lorsque son theme song ne change pas comme à l’habitude et que l’on prend conscience de ce qui arrive est juste magistral. Ce qui est encore plus magistral est la réaction de la foule pour un short. Oui un short, qui a fait se lever des milliers de personnes, avouez que c’est quand même dingue. Plus de cheveux rouges, plus de ballons, le retour du short propre au Rainmaker quand il était à son apogée, la défaite était impossible n’est-ce-pas ? En face de Kazuchika Okada nous avons Jay White. Tout de blanc vêtu, le néo-zélandais était sur son 31. Il a pourtant vécu un début d’année 2018 très compliqué. Donné en pâture à Hiroshi Tanahashi il y a exactement 1 an, on se posait beaucoup de questions quant au « nouveau projet de NJPW et de Gedo », ne voyant pas tellement ce que tout le monde au sein de la compagnie voyait en lui. Puis, au fil de l’année il est monté en puissance, remportant le titre IWGP U.S dans une victoire surprise face à Kenny Omega, il a peu à peu pris à bras le corps son rôle de heel en le perfectionnant. Le G1 Climax a aussi été un point fort de son année, en étant très proche de finir premier de son block juste derrière Hiroshi Tanahashi et Kazuchika Okada (deux hommes qu’il a battu lors des deux premiers matchs de son tournoi) devenant peu à peu le Heel numéro 1 de la compagnie. La fin d’année a été très importante, au sein de la storyline la plus intéressante post G1 Climax avec Kazuchika Okada et Hiroshi Tanahashi, Jay White est devenu le nouveau leader du Bullet Club aux côtés de Tama Tonga et de Gedo faisant de lui, pour de bon, le heel numéro 1 de NJPW. A la surprise générale, le retour du véritable Rainmaker va se solder par une défaite clean au terme d’un match où l’histoire s’est écrite tout seul, où la foule était à 100 % derrière Kazuchika Okada. Comme quoi les matchs classiques heel contre babyface sont loin d’être morts et produisent souvent les meilleurs matchs et les plus chargés en émotion. Il s’agit, selon moi, du meilleur match de Jay White chez NJPW, Kazuchika Okada a montré pourquoi il est très souvent considéré comme le meilleur catcheur du monde, bref un match très solide, plein de rebondissements, qui conclut une storyline passionnante et qui construit une star pour le futur de la compagnie : que demander de plus ?
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Au bout d’un moment il faut parler du cas Chris Jericho. A presque 50 ans, il a réussi en un an à montrer pourquoi il était l’un des meilleurs de tous les temps. Réussir à s’adapter tellement rapidement à un style de catch, à une foule qu’il n’a plus connu depuis quasiment 20 ans est tout simplement phénoménal. Il a complètement changé son style de catch conscient que ses capacités physiques sont loin s’être celles qu’elles étaient auparavant (restant très bonnes quand même). Nous avons à faire à un Chris Jericho bagarreur qui transforme quasiment tous ses combats en véritable street fight (ce qui n’était que très peu présent avant son arrivée). Le combat revanche face à Tetsuya Naito pour le titre intercontinental en pré main event est resté dans la même lignée. Il s’agit, personnellement, du match de Chris Jericho que j’ai préféré depuis … très longtemps. Un match très violent, très fun, une bagarre de rue à l’ancienne avec un selling de Tetsuya Naito toujours aussi impressionnant. On sent que Chris Jericho passe peut-être les meilleurs moments de sa carrière dans le ring, et ça se voit. Il a su apporter à la fois le prestige correspondant à sa carrière incroyable et à l’aura qu’il représente mais aussi quelque chose de réellement différent dans le ring et ce à 48 ans. Tetsuya Naito va remporter encore une fois le titre IWGP Intercontinental, ce qui le remet un peu plus au premier plan, lui qui a vécu une année 2018 assez compliqué par rapport à 2017.
Finissons avec le plat de résistance. Hiroshi Tanahashi, ou comment réussir à faire vibrer des millions de personnes à 42 ans. « The Ace » a réalisé une année 2017 pleine d’émotions au cœur d’une histoire de rédemption. Des défaites terrassantes contre Minoru Suzuki et Kazuchika Okada dans la première moitié de l’année annoncent une lente baisse de régime, ne pouvant pas suivre la cadence des nouvelles stars, « des petits jeunes ». Le G1 Climax va, encore une fois, être d’une importance capitale, déjà parce qu’il va le gagner mais surtout parce que l’on va assister à une formidable histoire de rédemption tout au long du tournoi qui va atteindre son apogée au cours de deux matchs fantastiques contre Kazuchika Okada et en finale contre Kota Ibushi. Le plus grand babyface de la planète (à mon humble avis), se retrouve donc en main event du Tokyo Dome encore une fois et on se dit également que c’est la dernière, que c’est un dernier baroud d’honneur. Du côté de Kenny Omega, l’année a réellement été spéciale. Un début d’année où toute l’attention était portée sur la storyline autour de The Elite, la réunion des Golden Lovers avec Kota Ibushi, mais toujours avec des matchs d’une qualité vraiment exceptionnelle. Puis vient le quatrième acte dans sa saga contre Kazuchika Okada. Un two out of three falls match, pas de temps limite, bref le match ultime. Avec toute cette pression, les deux homes nous ont peut-être sortis le meilleur match de l’histoire. Après avoir mis un terme à l’un des meilleurs règnes de champions des 20 dernières années, Kenny Omega est censé avoir un règne digne du catcheur incroyable qu’il est. Jusqu’à Wrestle Kingdom on compte trois très bonnes défenses de titres contre respectivement Tomohiro Ishii, Cody et finalement Kota Ibushi et Cody dans un Triple Threat. Le problème étant que pour un catcheur comme Kenny Omega des matchs « très bons » cela ne suffit plus, et il s’agit du même problème pour NJPW, mais nous reparlerons de ceci à la fin. Le match entre « The Ace » et « The Best Bout Machine » a été incroyable, le meilleur match de la soirée sans aucun doute, une fin peut-être un peu abrupte mais le match n’en est pas moins d’une violence assez énorme, l’enjeu se sentait directement chez les deux compétiteurs, nous avons peut-être déjà le match de l’année 2019. Hiroshi Tanahashi va remporter le titre qu’il avait perdu 3 ans auparavant et revient au sommet de la compagnie, « The Ace » redevient le visage de la compagnie.
CONCLUSION
Ce Wrestle Kingdom 13 aura globalement été très bon avec 3 excellents matchs qui peuvent déjà prétendre à être parmi les meilleurs matchs de l’année (Kota Ibushi vs Will Ospreay, Tetsuya Naito vs Chris Jericho et évidemment Hiroshi Tanahashi vs Kenny Omega). Pourtant les avis sur le show sont plutôt mitigés et beaucoup de personnes se disent légèrement déçus. On peut voir plusieurs raisons à cela. Premièrement le show est objectivement légèrement moins bon que les deux dernières éditions. En même temps la barre était tellement haute que faire mieux aurait été très difficile, cela nous amène au deuxième problème : l’attente des fans. Atteindre un tel niveau de qualité en 2 ans crée un niveau d’attente tellement élevé : il est impossible de réaliser des matchs 6 étoiles tout le temps. Finalement le show était soumis à d’énormes contraintes : les fins de contrats. Cody, les Young Bucks, Hangman Page, KUSHIDA, Kenny Omega étaient tous quasiment surs de quitter la compagnie après Wrestle Kingdom 13. Avoir autant de superstars, de champions sur le point de partir rend la tâche des officiels très compliqué quant à l’issue et la construction des combats. NJPW est obligé de miser sur des valeurs sûres ayant un contrat avec la compagnie (pas comme Kota Ibushi par exemple). Le nombre très important de changement de ceinture révèle un « nouveau départ » forcé pour la compagnie avec Hiroshi Tanahashi, Jay White et Will Ospreay comme fers de lance chacun pour de diverses raisons. Will Ospreay opère un changement de division complètement maitrisé pour le moment, Jay White se positionne comme le « quatrième mousquetaire » devant remplacer Kenny Omega comme tête d’affiche de NJPW en dehors du Japon et Hiroshi Tanahashi fait de la résistance et entame un huitième règne de champion IWGP.
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